Moissac Révolution

par Henry Lawrence

Approbation :

Tuer les membres du Conseil municipal avec une couleuvrine, sans frais de sépulture. Essorer le drapeau de leur sang dans les latrines. L'Hôtel de Ville est bien trop petit pour ces noirs pénitents. Il n'est point de travail « extraordinaire » qui ne conduise au bidet. Après délibération, une messe sera célébrée par le peloton d'exécution, nous illuminerons la ville avec un feu de joie.

Rapport :

Le corps d'une femme provoquait les sentinelles. Une marque au fer sur son épaule rappellera le prix d'un tel passage. A l'érection des notables, des volontaires répondront par l'arrachage de leurs membres et tout trouble similaire du corps sera surveillé par des patrouilles de nuit. Un bûcher sera érigé aux acclamations mille fois répétées de vive la nation pour tous ceux qui voudraient perpétuer le bonheur par l'union des deux sexes.

Réorganisation de la Charité :

Les indigents sont imposés par l'Eglise. Qu'importe ! Il sera décidé de dresser les pauvres à chasser les étrangers. Quant aux pauvres sans bras, ils n'auront qu'à déguerpir, inutiles qu'ils seront devenus à la contribution patriotique. Pour ce qui est des enfants trouvés sur le sol, et des bâtards que la municipalité n'a pas l'ambition de nourrir, les citoyens souhaitent dans l'intérêt de la fête à venir, et soucieux de leurs propres intérêts, qu'ils suivent, pressés par la milice, le même chemin. Les habitants de la paroisse Sainte Catherine demandent sur pétition à ce que la chasse d'eau soit réparée.

Les avocats du diable se réunissent à l'église. – « Ceux qui ont eu la tête coupée », disent-ils, « pourront se la recoller en faisant pénitence ». Aucun condamné n'a fait le rapprochement avec l'émondage des arbres de la promenade publique !

Quelle imprudence pour ce jeune homme inexpérimenté d'aller à la rencontre de son propre fusil !

Procès-verbal :

Un peuple immense de crânes vides qui allaient en cortège, joyeux et content, chantait le Te Deum de mille coups de canons – pour préserver du mauvais temps. Les participants dodelinaient de la tête, ce qui faisait un tintamarre de cloches, tandis que les meilleurs vins ruisselaient avec abondance des cadavres artistement rangés comme un mets exquis. Jusqu'à l'aumônier qui participait au concours de dames ! Il est à noter que les soldats se sont bien comportés.

Réparation :

Deux serruriers ont vérifié le montant de la réparation de la chasse d'eau Sainte Catherine avant paiement.

Compte-rendu :

A la question : – « Le secours est-il nécessaire quand tourne le débat de façon houleuse et quelle bouée, à cet effet, représentent un canon papal et 50 fusils achetés auprès des religieuses ? », le Conseil répondit favorablement en brûlant ses dernières cartouches sur l'interrogateur.

Contestation :

Une lettre renvoyée de département en district déclarait « entachés d'illégalité la constitution par le vote des corps religieux et des parlements », car « lieux de cabaleurs zélés » qui, « connaissant la loi, passaient outre », ce que « les gens non informés ne pouvaient faire ». Selon la loi, toute élection est nulle. « N'aurait-on pas mieux vendu à notre profit le lit de cette rumeur pour laisser accoucher du système le plus vicieux : permettre à des accusateurs inévitables d'intriguer à propos de l'innocence présumée des citoyens et d'arriver par cette constatation pitoyable à ruiner la liberté du peuple en nommant des procureurs et des présidents ? »
Rien ni personne n'autorise à le penser, pour preuve cet édit : « tout homme ayant péri de noyade sera récompensé ». Et c'est pour « raison de santé » que fut enfermé à Paris l'auteur de cette contestation.

Protestation :

Le malheureux auteur dont nous parlions précédemment, malgré les soins intensifs, succomba à la prison de la Santé. Et de sa missive, déclarée lettre morte, le Conseil s'engagea à ne pas répondre à ce qu'il dit être une provocation. La police, l'armée et le procureur se rangèrent à cet avis. Les erreurs d'imposition sont de graves maladies qui exigent tous leurs soins. Suite à cette affaire, le petit commerce réclama plus d'armuriers pour le trafic d'épices et une friche abandonnée pour enterrer les esclaves « trop fragiles » qui ont succombés aux voyages, les enfants de « bas étage » en surplus et les infirmes. Une messe fut arrêtée et approuvée.

Mesures d'exception :

Les croassements du monstre tricolore, de ces contre-révolutionnaires portant cocarde aristocratique (bleu UMP, blanc absent, rouge à parements rose et vert), des délateurs odieux sous l'apanage de l'honneur et de la vertu, de ces citoyens porteurs d'armes aux armoiries de leurs vestiges – avec identité, maison, « boues et baleyeures , tribunaux, textes officiels et bureau de Poste », nous obligent à nommer des commissaires afin d'établir un rapport sur réclamation du peuple pour imposition excessive. A la lecture de ce rapport, nul doute que toute surcharge sera remboursée.
Seront aussi affichées les interdictions suivantes :
1. le découpage public du territoire est anticonstitutionnel,
2. les prêtres et prédicateurs de toute obédience seront retenus jusqu'à ce que des informations sur leurs « bonne vie et mœurs » arrivent de leur Dieu,
3. les clans et sectes, les « partis » et plus particulièrement celui de type franc-maçonnique devront être dispersés.
4. Tout serment pourra être considéré comme nul.

La rivière des civils abattra-t-elle la veine soldatesque et les gendarmes nationaux remplaceront-ils dans leurs corvées les prisonniers ? Jusqu'à la réponse, la liberté d'opinion restera soupçonnable et interrogeable, le prêt à intérêt considéré comme « fourberie dévoilée », l'acte de guerre entre les mains de la justice dénoncé sans origine ou bien en tant que boucherie « conforme à d'anciens usages ». Il est demandé au peuple de former le projet à « contraindre les gens de pouvoir à obéir » et de s'organiser pour réquisitionner tout propriété foncière. Il faut aussi convoquer les demoiselles qui auront « mal fait l'amour » la première fois et leur nom affiché à la porte des églises (ces dernières seront sous scellés) par les gardes des vases sacrés. Quant aux infirmes des Conseils municipaux, ils devront prouver leur bonne foi et le peuple devra s'assurer qu'ils ne troublent plus l'ordre public.

L'accélération de l'emploi « des forces et des lumières » afin que naisse la foule en fleurs, qu'un certain charme touche à son comble les jeunes générations, que soient brûlées à la torche les derniers lambeaux du fanatisme, ne pourra s'effectuer sans placarder de tels arrêtés, sans expulsion des ecclésiastiques et sans transformer les abbayes en lieux laïcs. Un dépouillement des grandes familles financières, industrielles, commerciales, politiques et religieuses, vu « l'état et …la difficulté du chemin », excitera sans nul doute la bouche des doctrinaires et autres membres de la « Société des Amis de la Terre », grands utilisateurs à l'excès des rumeurs et des sondages ; un tel dépouillement sous la surveillance de la « Société populaire » sera d'autant plus agréable que leurs lieux de réunions et d'actions soient fermés par nos très puissants motifs.

Prestation :

Les demoiselles seront chargées de l'instruction publique et les églises conservées comme succursale, – « pour la commodité des habitants » , de leurs fosses septiques.

Récompense :

Il sera fait cadeau d'un sabre pour « boyaux sévices » dans le sein des procureurs qui auront rendu nécessaires les droits de patente à l'utilisation de la guillotine.

post-scriptum : Si nous devions condamner à la même peine ceux qui condamnent les autres, nous pourrions observer une nette recrudescence de l'absentéisme lors des réquisitoires.

Etat de vigilance :

Il peut être publié et ouï que le patriotisme fut responsable des événements désastreux et hostile à la responsabilité civique.
Sa création, à l'initiation des « frères et amis de la fulgurance militaire » qui faisaient connaître au peuple ce qu'il fallait penser ou se permettre, au son du tambour et des pets de la bénédiction guerrière (afin d'enrichir les fabricants de fusils), ne sera plus agréée par les citoyens comme indispensablement nécessaire à leur subsistance.

Desdites demoiselles, jeunes filles perturbées par les incursions indécentes, aux portes desquelles étaient apposés les scellés, par quelle poursuite de leur sentiment pourriez-vous expliquer l'encombrement des cimetières en oubliant ce qui occupe leurs grossesses ? Le ban de la récolte du sang y portera-t-il remède ? Attendrez-vous encore le prochain courrier pour vous rendre compte que l'homme n'est jamais coupable mais toujours malheureux ?

Au « Champ de Mars » le dieu de la guerre gênait à la navigation les citoyens qui voulaient vivre libres. Par « les loÿs et les roÿs » et par le monstre « égalité proportionnelle », furent élus les bureaux de commissaires et d'inspecteurs. Sous prétexte de prohiber les assemblées clandestines qui troubleraient les villes, l'Assemblée nationale s'établit seul endroit d' « utilité générale » et « dernier lieu de culte et de miséricorde ». L'embarras multiple lié à cet abus de pouvoir expliquent les « lance-cailloux » arborés par les pauvres et les haches brandies contre l'avarice des « évêques du numéraire ».

Sommation :

Arrêtez de faire une quête pour distribuer tous les jours du pain ! Par cette insistance, les infortunés se trouveront toujours dans le même embarras et les propriétaires exagéreront notoirement sur la valeur locative de leurs maisons et magasins. Refusons les billets de confiance lorsque le grain vient à manquer ! Ne recensons que les besoins ! Au bruit injurieux de la charité proclamons l'horreur de la famine conforme à « réprimer la discorde » en « alarmant les consciences ». Les promesses chrétiennes tendaient aux manœuvres criminelles. L'aliénation de l'absence fut mal connue surtout dans la confection des fantômes et autres saints lors des combats patriotiques, dans la solennité des Te Deum pour la liberté, les maîtres d'écriture s'offrant des frais de guerre et se couvrant de médailles en qualité es agitateurs.

Le blé est plus important que la monnaie papier et nul ne trouve le bon pain dans une église.

Patrouilles :

Tandis que les femmes patrouillent la nuit armées de bâtons, quelques prisonniers s'évadent avant sept heures du matin d'une maison publique.

Interdiction :

Proclamé et affiché l'arrêté d'interdire la liberté ? Faute de cloches fondrons-nous la monnaie ?

janvier 2003