Exténué de nuit
Rompu
par le sommeil
Comment
ouvrir les yeux
Réveil-matin
Le corps fuit dans les draps mystérieux du rêve
Toute la fatigue du monde
Le regret
du roman de l’ombre
Le songe
où je mordais Pastèque ininterrompue
Mille
raisons de faire le sourd
La pendule annonce le jour d’une voix blanche
Deuil d’enfant paresser encore
Lycéen
j’avais le dimanche
comme
un ballon dans les deux mains
Le jour
du cirque et des amis
Les amis
Des pommes
des pêches
sous leurs
casquettes genre anglais
Mollets nus et nos lavalières
Au printemps
On voit
des lavoirs sur la Seine
des baleines
couleur de nuée
L’hiver
On souffle
en l’air Buée
A qui
en fera le plus
Pivoine de Mars Camarades
Vos cache-nez
volent au vent
par élégance
L’âge ingrat sortes de mascarades
Drôles
de voix hors des faux-cols
On rit trop fort pour être gais
Je me sens gauche rouge Craintes
Mes manches courtes
Toutes les femmes sont trop peintes
et portent des jupons trop propres
CHAMBRES GARNIES
Quand
y va-t-on
HÔTEL
MEUBLÉ
Boutonné jusqu’au menton
J’essaierai
à la mi-carême
Aux vacances de Pâques
on balance
encore
Les jours semblent longs et si pâles
Il vaut mieux attendre l’été
les grandes chaleurs
la paille
des granges
Le pré libre et large
au bout
de l’année scolaire
la campagne en marge du temps
les costumes de toile clairs
On me donnerait dix-sept ans
Avec mon canotier
mon auréole
Elle tombe et roule
sur le plancher des stations balnéaires
Le sable qu’on boit dans la brise
Eau-de-vie
à paillettes d’or
La saison me grise
Mais
surtout
Ce qui va droit au cœur
Ce qui
parle
La mer
La perfidie amère des marées
Les cheveux longs des flots Les algues
s’enroulent au bras du nageur
Parfois
la vague
Musique du sol et de l’eau
me soulève
comme une plume
En haut
L’écume danse le soleil
Alors
l’émoi
me prend par la taille
Descente à pic
Jusqu’à
l’orteil
un frisson court Oiseau des îles
Le désir me perd par les membres
Tout retourne à son élément
Mensonge
Ici le dormeur fait gémir le sommeil
Les cartes brouillées
Les cartes d’images
Dans le hall de la galerie des Machines les mains fardées
pour l’amour les mannequins passent d’un air prétentieux
comme pendant un steeple-chase Les pianos de l’Æolian
Company assurent le succès de la fête Les mendiants
apportent tout leur or pour assister au spectacle On a dépensé
sans compter et personne ne songe plus au lendemain Personne excepté
l’ibis lumineux suspendu par erreur au plafond
en guise de lustre
La lumière tombe d’aplomb sur les paupières
Dans la chambre nue à dessein
DEBOUT
L’ombre
recule et le dessin du papier
sur les murs
se met à grimacer des visages bourgeois
La vie
le repas
froid commence
Le plus durles
pieds sur les planches
et la glace renvoie une figure longue
Un miracle d’éponge et de bleu de lessive
La cuvette et le jour
Ellipse
qu’on ferme d’une main malhabile
Les objets de toilette
Je ne sais plus leurs noms
trop tendres à mes lèvres
Le pot à eau si lourd
La houppe
charmante
Le prestige inouï de l’alcool de menthe
Le souffle odorant de l’amour
Le miroir ce matin me résume le monde
Pièce ébauchée
Le regard
monte
et suit le geste des bras qui s’achève en linge
en pitié
Mon portrait
me fixe et dit Songe
sans en
mourir au gagne-pain
au travail
tout le long du jour
L’habitude
Le pli pris
L’habit gris
Servitude
Une fois
par hasard
regarde
le soleil en face
Fais crouler les murs les devoirs
Que sais-tu si j’envie être libre et sans place
simple reflet peint sur le verre
Donc
écris
A l’étude
Faux
Latude
Et souris
que
les châles
les yeux
morts
les fards
pâles
et les
corps
n’appartiennent
qu’aux
riches
Le tapis déchiré par endroits
Le plafond trop voisin
Que la vie est étroite
Tout de
même j’en ai assez
Sortira-t-onJe
suis à bout
Casser cet univers sur le genou ployé
Bois sec dont on ferait des flammes singulières
Ah taper sur la table à midi
que le vin se renverse
qu’il submerge
les hommes à la mâchoire carrée
marteaux pilons
Alors se lèveront les poneys
les jeunes gens
en bande par la main par les villes
en promenade
pour chanter
à bride abattue à gorge déployée
comme un drapeau
la beauté la seule vertu
qui tende encore ses mains pures |