PRÉCISONS PRÉCISONS Nous dénigrons
l’Amérique parce qu’elle met au pas l’existence
privée et la livre à son opposée publique, dans
les mains d’une administration, qui utilise méthodiquement
l’inconscient. À un certain stade, dans la maîtrise
et l’affirmation, sa démocratie consolide l’absolutisme.
Sur de telles bases, la destruction sera à l’échelle
planétaire. Ce qui est faux est devenu total fétichisme, perpétuant l’absence de liberté au travers de la fonction sociale qui n’est, en quelque sorte, qu’une forme de domination : sa customisation. Nous libérer
est le but de cette tâche et, en tant que telle, par son immédiateté,
elle comprend la suppression des idéologies aussi bien que celle
de la poussière. Et le but ne sera atteint que lorsque cette
revendication, elle-même, sera supprimée. C’est pourquoi, aussi, luttant contre un système, la rébellion ne peut être de masse. Nous n’opposons pas un système à un autre système. Le Mouvement Danette n’est impulsé par aucune organisation. Aucune théorie non plus n’y gagnerait cette dimension profonde où se tient les fondements intimes de l’individu, quel que soit son appareil répressif. L’héroïsme se lèvera toujours pour combattre les violations de l’homme, jusqu’à celles qui se trouveraient dans l’administration collectiviste du bonheur et de la paix. Cependant, la rébellion ne peut être qu’individuelle et solidaire. La situation, dans son ensemble, comme elle nous est montrée, ne peut être qu’un mensonge. Les contradictions apparentes de la société sont en fait les multiples aspects d’une organisation particulière : sa force brute médite la destruction de l’humain, en toutes ses dimensions tandis que la production ne sert qu’à faciliter, comme le beurre dans le trou du cul d’un canon, la sodomisation totale des êtres, l’absorption dans sa force technique. Le mensonge ne se révèle pas, il se pavane. Il est visible jusque dans la manipulation des faits historiques, jusque dans la négation des besoins vitaux. Alors, combattant ce système inique, le contestant sur son propre terrain, sans arme et à peine plus de technique, le Mouvement Danette le tient en échec et devient ce signe historico-mondial qui anéantira sur la terre, de tout son poids — celui de ses faiblesses, les parasites qui rêvent d’avenir impossible, de solution atomique ou de pillage à l’échelle du globe. Notre expansion ne peut être arrêtée. Solidaires, puisque relayés par notre formidable machine de propagande, éveillés, puisque conscients, savants, visionnaires et humains, nous n’avons pas plus besoin de nous justifier.
[ haut ] * INTRODUISONS La menace d’anéantissement
n’est-elle pas la force même de l’industrie contemporaine
? Nous trouvant au bord du gouffre, ne serons-nous pas déterminés
à nous défendre ? N’étant manifestement que
virtuelle, la société préservée par le danger
qu’elle entretient et les catastrophes qu’elle produit peut
être tuée. Tuer la société ne peut que
produire la paix. Une communauté paisible ne peut s’accommoder
des exigences militaires. ————— Le fait est que vous êtes conditionnés par l’irrationnel, que votre fausse conscience a des allures de vraie, que vous avez, semble-t-il, perdu la signification du réel. Vous ne voulez pas changer de mode de vie ni refuser cette société car vous craignez glisser au bas de son échelle. En présence du vide intérieur qui vous hante, vous justifiez cette société par les « bienfaits » qu’elle vous procure. Nous vous prouverons, malgré tout, comment toutefois cette société a escamoté votre contenu le plus intime transférant à sa place une pensée abstraite, spéculant sur votre désidentification, progressivement, purement et simplement. Vous posant devant cette
ambiguïté, vous oscillerez entre deux solutions : Nous ne pensons pas
que vous devriez attendre. Chaque jour votre conscience sera un peu
plus dominée, autant par les événements accidentels
qui pourront surgir que par les catastrophes provoquées d’une
société qui cherche à bouleverser vos comportements.
La société d’automation se sert de vous comme instruments
automates. La société de production détermine vos
activités et vos attitudes. La société de distribution
détermine vos besoins jusqu’aux plus privés. La
société de contrôle s’étend à
vos neurones et se destine à dominer l’usage technologique
de votre destinée. Vous n’avez déjà plus
le choix d’accepter ou de rejeter ce projet politique par lequel
on réalise à votre insu des expériences fondamentales
de mécanisation humaine. [ haut ] * DÉVELOPPONS La raison démocratique
supprime l’individu ; afin d’aboutir, elle vide sa pensée,
sa parole et sa conscience. Son autonomie originelle a été
réduite autoritairement devant les enjeux économiques
et politiques. Désormais la réussite est quasi complète
; l’individu est transformé en sujet économique
qui ne se trouve devant qu’une seule alternative : mourir de faim
ou travailler. ————— La société démocratique ne peut plus être définie en terme de défense des libertés. Elle exprime, au contraire, la contrainte en forçant aux rapports économiques. Elle oblige à la lutte pour l’existence. Elle accule l’homme à gagner sa vie. Elle le place sous le joug politique, elle le noie dans la communication de masse, elle l’endoctrine grâce à ses faiseurs d’opinion. La société démocratique est une proposition utopiste ; les forces qui la soutiennent combattent la pensée individuelle en la traitant injustement d’utopie. ————— Distinguer le vrai du faux ? Facile ! Tout ce qui justifie le pénible, la misère et l’injustice est à la source du faux. Tout ce qui agresse au nom de la liberté doit disparaître. Généré dans le malaise, comment le bonheur pourrait-il s’y montrer vrai ? Et comment l’intime de chacun trouverait son aise dans un faux général ? Ce que nous ressentons — nos aspirations les plus intimes — n’est par essence pas analysable et à plus forte raison ne peut se situer sur le plan social, fonctionnalisé. La satisfaction individuelle ne peut se trouver dans la satisfaction des intérêts dominants lesquels, par définition, exigent la répression et le contrôle des individus. ————— Faire un gros caca, après tant d’ingurgitation de doctrines aliénantes, est un besoin qui doit être satisfait au même titre que se nourrir et se loger. Satisfaire ce besoin réalisera l’élévation inconsciente de vos êtres. ————— Rendez-vous compte cependant
que les intérêts sociaux ont conditionnés vos conduites
et dominer vos vies ! Ils furent, en amont de l’histoire humaine,
l’aval nécessaire pour vous pousser à l’objectivité,
que vous distinguiez le vrai du faux sur le terrain de vos besoins,
que vous puissiez évaluer ce qui serait priorité vitale,
autant individuelle qu’universelle et que personne ne le jauge
à votre place. ————— La communication de
masse vous conditionne et vous endoctrine. Elle vous divertit quotidiennement
des horreurs de la société endocrine. Et vos
enfants nourriront ses guerres et accroîtront le profit des trusts.
Ils seront comme vous : des objets humains qui délégueront
leur âme à leur automobile. Vous les aurez fait naître
esclaves des moyens de subsistance, sous la menace constante de la «
justice », de la police et des forces armées. Et leur cœur
deviendra moteur de destruction et de production, sous le contrôle
psychologique de la Raison sociale. Leurs émotions seront comme
les vôtres, manipulées. L’impuissance qu’ils
ressentiront sera le résultat d’une réalité
interne envahie par la police comportementale et l’empathie suggérée
par les médias aspirera leur identité privée. ————— Misère et injustice ? Peu de gens suspectent la science et la technique, ces deux instruments au service des pouvoirs établis, comme responsables. La ruse est de rendre illusoires toutes les alternatives ou de les frapper d’interdit lorsque leur insistance devient trop forte. ————— Le progrès est un faux mouvement indispensable à l’exploitation des facultés humaines. Persistant, il automatise besoins et satisfactions. Outil déclaré de pacification, dont la direction tend à la soumission des êtres — aux désirs sous régence —, il combat la liberté par l’abomination du travail. Sous couvert de neutralité et de dynamisme, le progrès n’est que la somme des opérations théoriques et pratiques qui enferment les hommes dans le S.S. (Système Social). Ces opérations que nous nommerons réglementations sont érigées pour entraver corps et esprits à l’irréalité de cette civilisation : elles transforment efficacement les hommes en ressources naturelles. Sous-produit ou matière première ? La conquête de l’homme suit de près celle du cheval. Aujourd’hui sa vie dépend surtout de l’efficacité à l’user ou à consommer ses facultés. À ce stade, l’existence humaine n’a plus d’autre réalité qu’un mobile de Calder : elle est devenue le véhicule de la machine. [ haut ] II — ALIÉNÉS POLIMENT A — Le travail est déguisé
en exploit scientifique dans la mesure où les individus
asservis au labeur sont engloutis par l’univers technologique.
La vie elle-même a pris la peau de la mort. La pierre angulaire
de cette théorie tient en ceci : de nos jours, les individus
sont privés d’existence privée. Suprêmes instruments
de la productivité, violés au tréfonds de leur
espace intérieur, les individus ne peuvent plus imaginer.
Voilà la torture ! Voici la réalité historique
! Voilà l’enfer ! Et le cynisme est poussé jusqu’à
les nommer « déshérités de la terre »
! L’automation mentale
consistant au blocage de l’esprit dans une tension mécanique
intelligente, logicielle, une greffe technologique est dite «
réussie » lorsqu’elle associe l’humain à
la machine par l’hypnose. Hypnose ? Sommeil artificiel. Ou rythme
régulé à la coordination de mouvements machinaux
et indépendants du plaisir. À l’autre bout du la
lorgnette, des sociologues observent le climat productif qui favoriserait
la croissance optimale des produits et, pourquoi pas, avec un peu de
satisfaction humaine. Au point où nous en sommes, l’humain
peut tourbillonner, rêver de caresses, machinalement, un peu.
Pas trop tout de même. Avec juste ce qu’il faut de lubrifiant
pour copuler au rythme des bits de la bande passante. Sartre, peu ébranlé,
s’en masturbait dialectiquement. ————— Autrement, pour en finir avec la production organique de plus-value, il faut en finir avec la notion de valeur liée à l’exploitation du vivant. L’homme, en particulier, n’est pas un équipement de l’industrie et ne peut être ni mesuré, ni payé. Libre de tout harnais, il ira à ses affaires, ailleurs, cultiver sa conscience. Fréquemment inconsistante, cette dernière change selon le degré de son instrumentalisation sociale et n’est que l’interprète des idéologies en formation. Extirpé de l’étau qui l’obligeait à se prendre pour du matériel de production, l’humain rira de l’automation volontaire et le chômage sera l’option la plus fréquemment choisie au diplôme de fin d’études ! Délié de toute suggestion qui l’attacherait à une profession, à une société ou au matériel, il apprendra surtout à s’éloigner des maladies et de certaines manières de mourir inhérentes aux habitudes de travail actuelles. Ce n’est pas en
vous posant comme contradiction vivante de la société
contemporaine que vous pourrez aller au-delà des barrières,
au-delà de ce monde de haine et de frustration, mais par votre
liberté souveraine d’agir selon vos aspirations,
par l’acte vivant de participer volontairement et solidairement
aux décisions dont dépendent la vie et la mort, comme
celles qui feraient sortir du cercle vicieux de la dialectique démocratique
et totalitaire. B — N’étant
plus qu’un agent mineur de richesse, l’homme est devenu
veilleur au chevet de sa propre aliénation. Son existence est
rendue facultative, voire obsolète, car la transsubstantiation
effectuée ayant assujetti la machine à la place de l’homme,
c’est, sur un plan opérationnel, l’affirmation de
la machine en tant qu’être et la possibilité du bannissement
de l’homme vers le néant (il s’agit alors d’une
double transsubstantiation). La coexistence compétitive de l’homme
et de la machine tourne irrémédiablement à la dictature
du prolétariat mécanique. ————— S’épanouissant dans la répression, la stupidité générale profite à ceux qui professent que la « création » de richesse libérera les hommes. Distribuée ou pas, cette fausse richesse découle d’une façon d’obéir, de voir et de penser. La vraie richesse est une qualité de se dominer, de se voir et de se penser. Et cette qualité ne peut s’acquérir sous la contrainte. Elle est immatérielle et immense. Elle est à découvrir, non en creusant des tunnels sous la terre, mais au fond de soi. Et de cette richesse intérieure chacun s’en trouve pourvu à la naissance, à l’état latent. S’en apercevoir et l’atteindre constitue le premier acte révolutionnaire : c’est la nouvelle lune de la conscience. À chacun sa conscience. À chacun son éveil. Sous l’appellation « Révolution des Consciences » nous ne faisons pas de différence entre les premiers et les derniers, entre ceux qui auront pour elle agi par humanité (la grâce ?) et entre ceux qui auront par elle agi devant la nécessité, entre ceux qui auront été leviers et ceux qui se seront levés. ————— Le confort est l’étau doré de la société d’aliénation. La création de ce qui n’a jamais existé, comme celles des marchandises nécessaires à de fausses satisfactions, jette les bases de l’exploitation mentale et abolit toute action instinctive ou spontanée. C —
Tant que la société
n’aura pas été réduite à l’état
d’illusion, ses agents parasitaires (publicité, dogmes,
politiques, etc.) auront recours systématiquement à la
réduction de la liberté individuelle. La vie régentée,
en apparence confortable revient à la lobotomie des consciences.
Nul ne peut trouver une solution aux problèmes qu’il rencontre
dans la société. Il faut chercher, voir, penser
et imaginer par soi-même, hors d’elle. ————— Il ne sert à
rien de dénoncer la société actuelle : ce sont
les sociétés et civilisations de l’histoire toute
entière, de l’antiquité à nos jours, qui
ont acculé les hommes en celle-ci. De tout temps, les gouvernants
se sont situés au-dessus et en dehors de la loi. En quelque sorte,
les gouvernants ont toujours été des hors-la-loi ; l’histoire
des sociétés et civilisations aura été l’histoire
de l’oppression de l’homme, celle des crimes contre l’humanité.
La folie humaine aura été jusqu’à verser
dans l’insane comportement qui consiste à tuer pour manger,
pour vivre, mais aussi pour son plaisir ou son loisir, pour sauver son
emploi et enfin, pour sauver l’économie. ————— Nulle part la liberté ne peut trouver sa place dans un système organisé, enrégimenté. Et la démocratie contient en elle les forces actives pour dissuader ceux qui y aspirent. La dissuasion n’est pas dirigée vers un hypothétique ennemi mais sert à conditionner l’opinion de tous les individus. S’appropriant socialement les vies humaines, la démocratie déshérite dialectiquement ses inutiles, ses pauvres, ses marginaux, ses chômeurs ; elle investit dans les prisons et les hôpitaux psychiatriques. La démocratie est le système de domination le plus efficace, pourtant, la terreur n’est pas seulement le résultat de ce système : la terreur est l’outil de l’élite dominante, sa priorité des priorités, sa raison d’être et sa suprême mystification. Subordonnant la réalité au spectacle, la fin de la démocratie est contenue dans ses moyens. [ haut ] III — CONQUIS MALHEUREUSEMENT Nous avons avancé sur le terrain politique. Qu’en est-il de la nature et du destin de l’homme ? Est-il victime de son succès lorsque la machine liquide son esprit, le traitant d’infirme ? N’est-ce point son idéal qui est en train de devenir réalité ? Le culte de la personnalité
découle-t-il de celui des héros ? Serait-ce la cause qui
servit la destruction de l’individualité ? Élevant
certains hommes au rang de demi-dieux, les autres ne furent-ils pas
ainsi abaissés, incorporés à la masse, indivise,
l’idéal hors de portée ? L’idéal humain se réduirait-il à des opérations boursières ou mathématiques ? C’est par les perversités de ses agents qu’ainsi la société industrielle matérialise le sublime et l’idéal, les transmuant d’anciennes valeurs romantiques — donc surannées — en valeurs esthétiques, intellectuelles et morales sur le terrain progressiste du calcul et du profit. L’artiste, le guerrier, le fou et le gangster ne nieraient pas l’ordre technologique : ils l’affirmeraient tandis que leurs névroses y seraient normalisées par un système de surveillance distanciée ou médiatisée, un système à multiples facettes et variantes. ————— Le monde de l’ordre sous forme d’objets ou d’instruments au service des objets, ou, plus exactement le monde des formes, exprime en manières spatiales et rythmiques la pensée, la contemplation ou le sentiment. Il tend au dépassement du rêve par la féodalisation du rêveur au culte des formes et des images. Déterminant l’individu au sein d’une situation inféodée à ce confort, le monde des formes absorbe sa conscience, manipulant ses stimuli, hantant ses relations. Il aliène ses refus et ses oppositions en s’accaparant tous les choix. Il dénigre les mondes anciens et discrédite les avant-gardes. Il réprime toute action qui tendrait à formuler un bonheur sans la société et, quand bien même subsisterait la mémoire de l’idéal humain, elle serait incompatible avec la nouvelle vérité générale, comme déclarée perdue, survivance désuète, étrangeté consommable avec modération, dépaysement intellectuel. Elle serait absorbée par le système totalitaire des vérités contradictoires, soumise à la coexistence avec les formes humaines aliénées, dans leur indifférence. ————— C’est toutefois reléguer nos forces cognitives dans une dimension illusoire, sans pouvoir subversif. Nos évocations n’ont cependant rien à voir avec celles des sociomaîtres. Puisque ces derniers déterminent la nature humaine sur ses comportements, refoulant les causes de la terreur et des échecs collectifs à l’endroit même où est annihilé l’être, s’en délectant, le diluant — son enveloppe — dans un tout absolu, suprême et social, alors, en la prise de conscience des hommes de cette nouvelle dimension, que nous nommerons « cosmique », réside l’impossible solution — le miracle suspendu —, pour que les hommes affirment leurs amours ou leurs haines, pour qu’ils refusent tout type de résignation ou de compromission, pour qu’ils secouent les jougs physiques et psychologiques. Créant le bonheur par la réconciliation, l’homme cosmique transfigurera les conflits en vecteurs de fictions, de faussetés prouvées, de mutilations et négation des êtres, d’enfer de l’homme pour l’homme. ————— Comme il ne peut y avoir de négation du système sans sa reconnaissance implicite, il n’est alors possible de sortir du cadre de cette société dictatoriale et marchande qu’en sortant du cadre même de son discours. Puisque cette société a intégré dans son discours toutes les formes de protestation, de contestation et de transgression, étant elle-même productrice de tabous et d’interdits aux fins d’accroissements conjugués de bénéfices et d’aliénations, alors il ne peut y avoir de changement sans mise en pratique en dehors de tout théorie. Si le spectacle est total, jouons notre insurrection comme s’il s’agissait d’un divertissement total, celui de nous en dissocier. Il nous faut réfléchir mais ce n’est qu’après notre arrachage hors de sa gravitation -— quelque part hors de nous-mêmes — que nous pourrons trouver de nouveaux moyens organisationnels. Ce n’est que sauvés, loin de sa menace, par un engagement irréversible que nous découvrirons les idées — donc le langage — absentes de ce système, celles qui nous permettrons de réaliser, pour notre plaisir et dans la joie, la grande tâche de commencer un nouveau monde. Comme le rétablissement de la réalité vraie dépend de la mobilisation de chacun, le Mouvement Danette vise à rompre le charme d’un cadre qui n’existe pas et à véhiculer chaque être ainsi éveillé avec sa propre conscience. Nous ne sommes pas des objets solitaires sur le sol de la lune. Nous sommes capables de liaisons, de tendresse pour nous opposer à la violence et à la terreur. C’est en fondant une terre sacrée et en sacrant les enfants rois de cette terre, que nous évanouirons l’enfer présent parmi les résidus du passé. Que rien ne soit interdit aux hommes pour supprimer les distorsions du désir. Que la loyauté des hommes envers ces serments enchantent la mer d’une romance inoubliable. Alors les cruautés, l’avarice, l’exploitation sous toutes ses formes, les fraudes et les mensonges, causes des combats et des déceptions, s’évanouiront comme au réveil tout cauchemar, emportant la misère, dissolvant les conflits. D’ores et déjà, faisons la publicité de la Justice, la promesse du bonheur en dépend. N’oublions pas non plus la dimension métaphysique de l’Homme, ni la dimension sublime de chaque être vivant, homme, femme et enfant, humain et animal, animé et végétal. Les refuser ou les bloquer reviendrait à prescrire de nouveau la méthode dont les dirigeants du système se servent pour avilir l’humanité et piller la planète. La vie est invisible et constitue pour chacun LE droit imprescriptible. La quête du sens des choses et de l’existence réclame une méditation qui passe par le droit à la solitude et au secret individuel. Dans la fortification de l’individualité repose la découverte des raisons de nos différences. Si les besoins vitaux
sont des droits imprescriptibles, chaque humain ne devrait-il pas partager
le labeur de ceux-ci s’ils dépendent des autres ? Ne paraît-il
pas évident qu’en fonction de nos capacités nous
puissions nous unir aux autres pour accomplir notre part et révéler
selon notre instruction — pour les enfants, celle qu’ils
choisiraient — les spécificités qui nous sont propres.
Et reconsidérant nos besoins et faisant l’état des
lieux local et planétaire, le travail sera considérablement
amenuisé afin de pouvoir nous reposer et vaquer librement
à nos occupations personnelles car la manière de vivre
ne doit plus être tolérable mais agréable,
non pas utile mais instructive. ————— Si les acteurs politiques et économiques actuels jouissent financièrement du besoin que les êtres ont de vacances, c’est bien parce que ces derniers aspirent à changer régulièrement d’air et d’espace. Il est donc fort probable qu’une certaine forme de nomadisme prédomine : le voyage, le dépaysement, la promenade et la dérive participent naturellement à l’épanouissement de l’être d’autant que les échanges génétiques, intellectuels et spirituels favorisent l’élévation de l’Homme ; d’autant qu’une sédentarisation forcenée des êtres, le confinement, la « concentration », premièrement, diminue considérablement le champ de la cathexis libidinale, restreignant l’érotisme au seul acte sexuel, deuxièmement et par contrecoup, augmenterait les violences conjugales qui procèdent de l’insatisfaction de la libido (autrefois, la sédentarisation participait aussi à la frénésie des naissances freinée, aujourd’hui, par la contraception). Enfin comprenez que la sublimation érotique est devenu l’instrument fondamental de la répression opérée par et sur l’individu, le conditionnement essentiel qui permet à la société marchande d’exploiter les mœurs, de vendre selon ses critères, la beauté, l’hygiène, les vêtements, mais aussi d’exposer ses maîtresses, ses employées, ses bourgeoises, etc., en deux mots : ses putes et ses gladiateurs. Il semble donc que la liberté de circulation des êtres dans un tel système passe par la manipulation de ses désirs aux fins de niveler son existence au rang d’une marchandise divertissante. L’orientation de la sublimation aux fins commerciales explique aussi la soumission des individus, leurs pertes conjointes de conscience, de lucidité et d’autonomie. Il en découle une quantité industrielle de frustrations dont les politiques se jouent, sur un mode fasciste, en orientant les conflits aussi bien que les adhésions. Ainsi fleurit l’aliénation dans la liberté tandis que l’exploitation des satisfactions acquiert cette tendresse infinie qui sied à l’oppression. La libéralisation sexuelle aurait-elle un lien économique étroit avec la dissuasion nucléaire ? La conquête de l’homme réalisée par la manipulation et le contrôle technique de ses organes mentaux, doit permettre l’anéantissement, approuvé par ses victimes, de millions d’humains. Système élaboré par les allemands (en Afrique du Sud) et peaufiné par les nazis, les camps de concentration dans lesquels, aujourd’hui, ses héritières — les forces américaines et ses alliées — entraînent à dessein les populations, semblent être un jeu de rôle (drôle ?) au service des élites multinationales : elles seules doivent en sortir sauves. De toute évidence, la mort historique et programmée des peuples est devenue une entreprise privée. [ haut ] * CLOUONS TOUT DISCOURS Au bon vouloir de votre refus dépend que vous soyez damnés de la terre ou non. La patience est fallacieuse lorsque c’est votre destruction qui se trame dans la routine des refoulements introjectés successivement par les publicistes et les politiques. Est-il concevable d’être humain en étant brutalisé, exploité, manipulé ? Les forces conscientes de la domination ont déjà répondu en orientant vos satisfactions vers le superflu. Assigné à la servitude « librement » consentie, l’homme n’a de place dans leur système qu’en tant que ressource disponible d’un commerce plus équitable. Au-delà, son esprit ne peut guère s’aventurer, de peur de se diluer dans des spéculations non scientifiques. Au-delà, certains scientifiques, justement, ont réussi à faire s’enculer les mouches. S’ils peuvent faire que les mouches deviennent homosexuelles, que peuvent-ils faire de vous ? ————— La société d’abondance ne peut croître que continûment au gaspillage. Si l’élimination des minorités, des marginaux et des exclus se conjugue dans cette dynamique, alors les services sociaux, la police et les tribunaux procèdent au ramassage des ordures. La thérapie militaire consiste à débarrasser la société d’abondance du surplus de ressources humaines. Introjectant une moralité qui lie l’humain aux marchandises, les dominants insinuent que, selon l’offre et la demande, ils pourraient produire la quantité nécessaire d’hommes en adéquation avec la production des objets et que, de surcroît, ils détiendraient la signification de leurs existences. ————— Toute analyse critique de la société d’abondance requiert une part d’obscénité. Elle est la réflexion objective de son image obscène en laquelle on peut voir des millions d’êtres mourir de faim tandis que la société vomit ses marchandises, tandis que ses politiques sourient, tandis que ses prêtres prient, tandis que ses intellectuels discourent, repus. Élevez-vous au-dessus du réel, tétez la mamelle médiatique ! L’automobile et la télévision sont les meilleurs agents de la domination. Ces derniers transsubstantient le bonheur en marchandise et les utilisateurs en engins mécaniques. Soyez heureux de votre sort, êtres obscurcis ! Grâce à vous, des milliards de vos semblables souffrent ! Pourquoi ? Que vous vous incarniez dans un moteur, que vous garnissiez de chair une prothèse ? Loin d’être une idée abstraite, les agents scientifiques du système y parviendront peut-être avec votre consentement tandis que ses philosophes transhumanistes [ 2 ]vous feront gober la mouche. A — J’ai fait allusion à la réduction de votre pensée. J’ai évoqué la falsification de vos apparences par ce régime fasciste qui, en truquant l’histoire, réfuta votre mémoire et mit en cause votre lucidité. J’ai montré comment l’opposition apparente de la bourgeoisie et du prolétariat participait du même système oppressif. J’ai illustré la coexistence pacifique du vrai et du faux en fonction des exigences à géométrie variable du système démocratique et, sur ce point, comment ses représentants sont les vrais révisionnistes et les ultimes déviationnistes. Mais ce n’est pas tout : la société tout entière est une dictature qui contrôle et manipule. Vos choix, intrumentalisés par les dogmes de l’information, reflètent uniquement votre obéissance puisque vous agissez en conséquence de la raréfaction discursive et linguistique. Grâce aux vicissitudes politiques qui vous font croire souverains dans vos décisions, vous serez vos propres bourreaux du conflit qui se prépare. B — Il faut faudra dépasser
le contenu de votre substance pour reprendre le contrôle et la
gestion sur vous-mêmes. Didier Somvongs note 1 : Herbert Marcuse —
L’Homme unidimensionnel — Éditions de Minuit, 1968.
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